Œil d’artiste – Saison 01, Épisode 03
Pegasus par Odilon REDON (1840-1916).
Observez la vibrance apportée dans la couleur. Le bleu est utilisé sur le corps de Pégase pour simuler une sorte d’ombre propre au corps, et surtout, pour mettre en valeur les ailes, éclatantes ! Elles représentent l’intensité maximale du tableau, rehaussé par du jaune à leurs extrémités.
Encore plus de luminosité est apportée sur le plateau rocheux grâce au contraste chaud-froid donné par l’ajout du bleu. De quoi faire vibrer la couleur en un reflet céleste, incrusté à même la roche…
« Colin-maillard » par Jean-Honoré FRAGONARD (1732-1806)
Observez l’ambiance dégagée par l’image. Les couleurs ont un petit coté irréel, très fantasmagorique, tel un songe. À votre avis à quoi cela est-il dû ? Si vous plissez des yeux vous remarquerez le peu de contraste de luminosité entre les teintes du tableau. Seul le blanc apporte une touche de lumière. Le blanc sur le bandeau de la femme se prêtant au jeu de Colin-Maillard… Un blanc qui va alors se répandre sur les tenus des autres personnages, le tronc de l’arbre, ses branches, la végétation au sol, …
Ajoutez à cela l’exagération de la perspective atmosphérique, où l’arrière plan est complètement atténué, presque effacé…
Une illustration de Jimmy Swinnerton (1875-1974).
Observez le design du personnage principal. Ses proportions sont établies pour créer ce qu’on nomme de l’« appealing » (être attrayant, créer un intérêt, plaire). Avec sa tête volumineuse, rappelant les proportions d’un bébé. Au bout de sa queue, une touffe de poil tel un éventail, de petites jambes et un corps en haricot. Des proportions allant vers la forme plutôt que la ligne, avec une silhouette générale incluse dans un joli cercle.
Son corps étant réparti sur une ligne de force toute en courbe, telle une virgule enjouée, nous faisant ressentir davantage de sympathie pour lui.
« The Actress », peinture à l’huile par l’artiste américain William Whitaker.
Observez l’harmonie des couleurs. Où le rouille du fond entre en contraste avec le vert de la robe. un contraste de couleur complémentaire qui est harmonisé par des couleurs dans l’ensemble désaturées.Des rappels de couleurs y contribuent, tel le vert en bas du fond rouille. Les touches bleues sur le fond rappellent la teinte du foulard, atténuant le contraste chaud-froid entre ces deux éléments du tableau.
Lorsque vous gérez les couleurs de vos peintures, tout est affaire de nuance ! (Jeu de mot… 😉 )
Une illustration réalisée par Jonas De Ro, concept designer.
Observez où votre regard se porte dans cette peinture digitale ? Il est attiré par l’horizon et la citadelle s’y trouvant. Cela est rendu possible par plusieurs choix dans l’image. Le contraste chaud-froid entre le ciel nuageux et le soleil couchant. La lumière chaude étant plus active, elle attire en général davantage le regard. Surtout ici où elle est peinte en une fine bande de lumière. Cela donne un contraste lumineux maximal avec la citadelle s’élevant vers les cieux.
Notre regard est attiré par les plus grandes différences, c’est ainsi que vous guidez le regard de vos lecteurs !
Un croquis d’Ursula, par Glen Keane, animateur et réalisateur aux studios Disney.
Observez les angles données aux lignes de force. La courbe du dos dirige notre regard vers le visage. L’axe central du visage est placé à 90° par rapport à celle du dos. Un changement de direction très brusque, créant une croix et donc, un point de force au niveau de la nuque. La main placée horizontale crée un support, tel un tremplin qui permet de remonter vers le visage et d’y illustrer la condescendance d’Ursula.
Au delà de représenter, chaque ligne doit toujours servir l’histoire de votre image.
Un aperçu du plafond de la chapelle Sixtine, par Michel-Ange (1475-1564)
Observez la représentation de l’anatomie chez cet athlète nu (les célèbres ignudi). Les volumes généraux permettent l’application de la lumière, tel son bras où les faces d’une boîte sous-jacente sont visibles. La face au-dessus est éclairée, celle à gauche à l’ombre.
Les masses musculaires précisent cet éclairage et répondent à la position du personnage, tel les plis de compression sur le cou ou le trapèze remonté.
Ossature, visible par endroit, comme son ulna (cubitus) sur lequel il prend appui.
Volumes généraux, masses musculaires, ossature. De là est la crédibilité d’une anatomie.
Une gravure de William HOGARTH (1697-1764), de sa 1ère série intitulée « La Carrière d’une prostituée ».
Observez, ce que vous observez ! Où va en priorité votre regard ? Comment amener le spectateur vers les éléments important de votre image ? Par le contraste toujours ! Ici vous en avez un très bon exemple où les valeurs de luminosité sont créées par des successions de hachures, plus ou moins resserrées, plus ou moins croisées. Le personnage principal est : mis en valeur. Là où les figurants seront estompés. Ils sont suggérés, sans attarder sur eux un regard qui doit naviguer vers les éléments clés.
Une peinture de Wassily Kandinsky (1866-1944).
Observez le joyeux méli-mélo que représente cette composition abstraite, et surtout l’harmonie qui en est pourtant dégagée. Un savant mélange de répétition & variation, similitude & différence, symétrie & dissymétrie, … Couper l’image avec deux lignes verticale noires et centrales pourrait considérablement figer la peinture. Ici cela passe très bien, puisque cette rigueur atténue le désordre alentour.
Une certaine unité est également présente car les éléments semblent tous suivre la courbure de la colline. Ainsi soumis à la même force, on en déduit qu’ils appartiennent à la même toile.
On croirait se balader dans un paysage… Les peintures de Kandinsky sont magnifiques quand on prend le temps de les observer.
That’s all Folks !
Rendez-vous dans le prochain épisode avec :
Matisse, une magnifique illustration de Grzegorz Rutkowsk, et bien d’autres !
Lisez les autres épisodes d’«Œil d’artiste » !
« Œil d’artiste, saison 1, épisode 1 »., « Œil d’artiste, épisode 2 », « Œil d’artiste, épisode 3 ».
« Œil d’artiste, épisode 4 ». « Œil d’artiste, épisode 5 ».
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